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Canadian Urbanism Uncovered

Ville Mont-Royal : elle a de beaux restes

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Tirée à quatre épingles et bourrée de fric, Ville Mont-Royal (VMR à ses amies) incarne l’archétype de la beauté urbaine. Un véritable village verdoyant au milieu de l’atmosphère grisâtre montréalaise, la municipalité re-émancipée s’est acquis une réputation en tant que douairière blanche, protestante, et anglo-saxonne qui haït les enfants, les pauvres, et la communauté des immigrants qui l’enclosent.

Mais, ostie qu’elle est belle.

The Birth of a Town : TMR
Née en 1912, elle se posait comme la ville exemplaire du mouvement « cité-jardin ». Elle ne se trouvait pas seule à cet effet ; le faubourg de Maisonneuve empruntait de la doctrine urbanistique City Beautiful et il figurait dans la liste des banlieues nanties de cette époque. Hélas, ce dernier a témoigné un renversement de sa valeur pécuniaire. Ville Mont-Royal, comment avez-vous pu narguer un destin semblable et, à la fois, garder votre charme ? L’argent, cela aide, oui. Mais, la réponse réside surtout dans un des meilleurs outils juridiques d’urbanisme disponible au Québec : le PIIA

Le PIIA, qu’est-ce que c’est ?

Le Règlement sur les plans d’implantation et d’intégration architecturale (PIIA) fait partie de la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme. Citons « La prise de décision en urbanisme » :

  • [le PIIA] convient bien aux projets d’une certaine envergure pour lesquels on souhaite s’assurer d’une certaine unité et harmonie (p. ex., développement d’un nouveau quartier, insertion d’un projet particulier de construction, de modification ou d’occupation) ou à ceux qui se trouvent dans des zones d’intérêt particulier (p. ex., un quartier ancien, un secteur boisé).
  • Dans la plupart des cas, l’enjeu réglementaire sous-jacent à l’approbation d’un PIIA sera d’assurer la bonne insertion de nouvelles constructions ou d’aménagements de manière à ne pas altérer le caractère ou à rompre l’équilibre des lieux.

La plupart d’arrondissements et villes de la région montréalaise emploient un PIIA : Verdun et Outremont servent d’exemples. Pourtant, la façon considérable dont cet outil est utilisé à VMR est intéressante.

TMR/VMR 2
Les particularités du PIIA mont-royalais

Le PIIA constitue la bible urbanistique de VMR. Codifiée dans sa forme actuelle à dater des années 2000, l’harmonisation des caractéristiques architecturales existait en pratique depuis la fondation de la ville. Ce règlement s’est basé sur huit styles de maison, répartis selon les trois grandes phases du développement urbain, pour orienter les propriétaires dans la bonne direction avec leurs projets.

La première phase s’étend de 1915 à 1935 et regroupe toutes les maisons de style faubourien et cité-jardin.

La deuxième s’étale sur la période 1935-1955 et comprend les maisons de type Nouvelle-Angleterre, les maisons canadiennes et les manoirs anglais.

La troisième regroupe les maisons de cottage, les bungalows et les maisons à demi-niveaux et s’étend sur la période 1955-1975.

En outre, le PIIA de VMR comprend non seulement les zones résidentielles, mais aussi les zones commerciales, industrielles, et le secteur du centre-ville.

Procédure d’évaluation des dossiers en matière de PIIA

Afin de certifier la qualité gestionnaire du PIIA, le service municipal d’urbanisme et d’inspection détient un dossier en vigueur de chaque construction se trouvant sur son territoire. Le dossier contient principalement le plan original de chaque construction ainsi que tous les plans pour lesquels un permis a été remis.

Simple est la procédure de rénovation d’une construction existante.

L’intéressé soumet à la direction d’urbanisme et d’inspection les plans détaillés du projet. La directrice du service en fait un jugement de conformité du projet aux règlements de PIIA. En cas de non-conformité, les plans sont remis à l’intéressé en vue d’y apporter les correctifs nécessaires. En cas de conformité, le dossier complet est acheminé au comité consultatif d’urbanisme (CCU) qui, après l’avoir analysé, donne son avis sur la demande. À la suite d’une déclaration favorable, le CCU fait parvenir le dossier au conseil municipal qui l’approuve officiellement. Plus ou moins cérémonieux, le conseil municipal avalise 99 % des décisions du CCU.

Concernant la démolition, la procédure est plus élaborée. On ne peut aller raser les immeubles charmants et patrimoniaux comme Godzilla, ou comme la ville de Montréal. Il faut jouer le jeu; il faut danser le ballet.

La démolition ne comprend pas qu’une destruction totale; dès qu’une rénovation englobe plus de 60 % de l’immeuble existant, la ville considère le projet comme démolition. Façadisme ne peut duper VMR.

La direction d’urbanisme et d’inspection reçoit une demande de l’intéressé accompagnée de tous les détails techniques nécessaires à dessein d’évaluer l’état de l’immeuble en question.
Les principaux en sont :

  • —> Détérioration de l’apparence architecturale, du caractère esthétique, de la qualité de vie du voisinage et du coût de la restauration.
  • —> La durée anticipée des travaux et la date anticipée d’occupation du nouveau bâtiment.
  • —> La photographie des façades du bâtiment et du voisinage.
  • —> Le plan d’implantation : le coefficient d’emprise au sol (CES), les trottoirs, les arbres à conserver, le paysage, la rue et la façade principale
  • —> Un paiement de 1000 $ non remboursable pour couvrir le coût de l’étude de la demande.
  • —> Des frais de 500 $ pour couvrir le coût de publication au public.

D’une manière semblable à la procédure de rénovation, une demande obéissant aux critères du PIIA est acheminée au comité de démolition, composé de trois élus municipaux ayant le pouvoir décisionnel.

But wait, there is more!

En cas de conformité et de l’approbation du comité de démolition, 30 jours sont accordés à tout intéressé pour interjeter appel de la décision par-devant le conseil municipal. Si aucun appel n’a été constaté, la direction d’urbanisme et d’inspection, avec l’approbation officielle du conseil municipal, délivre le permis.

Que les travaux commencent!
TMR/VMR 3
Le PIIA, marche-t-il toujours?

Ville Mont-Royal a connu 2 cas piquants :
1. L’affaire du 414, avenue Kindersley et la Cour d’Appel

L’avenue Kindersley se situe en Phase 2 (1935-1955). Les propriétaires ont pris possession du 414 en juillet 1998. En février 2000, ils voulaient agrandir et rénover leur résidence. Lors d’une rencontre avec la directrice d’urbanisme et d’inspection, ils ont été informés que leurs plans n’étaient pas conformes aux critères de PIIA. Néanmoins, la directrice soumettait les plans au CCU sur demande expresse des propriétaires. Le 24 mars, la demande a été refusée par le CCU : elle n’était pas conforme au style du quartier. Cette décision du CCU a été entérinée par le conseil. Les mêmes résultats ont eu lieu en avril, en mai, et en août 2000. En septembre 2000, les propriétaires ont décidé de commencer leurs travaux avant qu’un permis ne leur soit délivré.

Corollairement, les propriétaires recevaient 4 constats d’infraction par des inspecteurs de la ville pour leur continuation des travaux. En février 2001, la Cour supérieure a ordonné la cessation de tous travaux. En appel, les propriétaires ont perdu et ils devaient suivre un plan respectant le PIIA pour leur projet.

Alors, le PIIA résiste à l’épreuve juridique. Aux propriétaires voulant détruire le patrimoine architectural de VMR : Prends ça dans les dents! La Cour Suprême soutient la ville. Or, la Cour de l’opinion publique n’est pas si accommodante.
TMR/VMR 1
2. L’affaire du 166 Chester et la Cour de l’opinion publique

L’avenue Chester se situe en Phase 1 (1915-1935) et Phase 2 (1935-1955), l’une des seules rues dans la ville comportant une vraie mixité de styles de toutes les phases du PIIA. La maison en question, à caractère faubourien, est devenue vétuste, à cause de son manque d’entretien de la part des anciens propriétaires.

Les nouveaux propriétaires ont acheté la maison avec l’intention d’y habiter. Mais, après l’avoir habitée, ils ont décidé que l’état de l’immeuble était tel qu’il fallait procéder à des travaux de rénovation. À la suite d’une rencontre avec la directrice d’urbanisme et d’inspection, ils ont décidé de démolir la maison, car la rénovation concernait plus que 60 % de la maison. En octobre 2006, avec les plans de leur nouvelle maison, les propriétaires ont soumis une demande au comité de démolition. La demande de permis a été refusée; les nouveaux plans n’étaient pas conformes à l’aspect architectural du voisinage (Phase 1). Ces plans comprenaient une structure moderne et écologique (dont un toit vert). L’architecte même, chargé de ce projet, assumait la non-conformité aux règlements du PIIA.

Les propriétaires mécontents ont renseigné les voisins de leur situation pour venir à leur rescousse. Ils ont présenté directement au conseil municipal une pétition signée par les résidants du quartier appuyant leur projet. Malgré l’opinion défavorable de plusieurs experts, le conseil a approuvé la demande au nom du processus démocratique.

Les citoyens, sont-ils contents? Non. Aujourd’hui, pour quelques citoyens, la nouvelle maison est considérée comme une flétrissure au paysage urbain. L’affaire suscite toujours une grande polémique.
166 Chester
Sommaire

Le PIIA, fonctionne-t-il bien sur le territoire de Ville Mont-Royal ? Je vous invite à visiter les environs : au milieu du Boulevard de l’Acadie, ou au carrefour de Jean-Talon/Dresden/Côte-des-Neiges/Laird. On peut remarquer de façon claire la frontière entre VMR et Montréal (Parc-Extension et Côte-des-Neiges) : d’un côté (la cacophonie urbaine) à l’autre (la consonance provinciale).

La réglementation n’est-elle pas trop sévère? Toutes ces règles, ne s’empêcheront-elles pas la jouissance des citoyens? En effet, non. Le PIIA est modifié au fur et à mesure en concertation avec les citoyens pour permettre l’utilisation de nouvelles technologies de construction. En plus, la ville les renseigne au PIIA. Il existe non seulement des textes publicitaires sur la réglementation, mais aussi, la ville anime des séances d’information sur le PIIA plusieurs fois par l’année. La directrice du service d’urbanisme, Mme Bonnie Hill, soutient que même les propriétaires mécontents sont satisfaits avec les décisions du CCU. Elle estime que dans 99,9 % de cas, les propriétaires apprécient les décisions prises au CCU, ainsi que ses recommandations.

Toutefois, il existe des pièges. Peut-être le PIIA fonctionne-t-il bien à Mont-Royal étant donné son homogénéité sociale : bien qu’il ait maintenant un caractère multiethnique, autrefois la municipalité n’était que blanche et british. En outre, la classe économique qui y demeure n’est pas mal : selon l’Institut de la statistique du Québec, le revenu moyen familial à Mont-Royal est 141 848, $ — en 3e rang sur toute l’île de Montréal.

Pour les amants de la démocratie, ceux qui ne sont pas d’accord avec la décision du CCU et du comité de démolition peuvent se présenter directement au conseil municipal. À eux, je leur dis : Bonne chance! En général, les dossiers refusés par le CCU le sont aussi par le conseil municipal, car les sept membres du conseil municipal font souvent partie d’autres comités municipaux.

Par ailleurs, tout le monde se connaît à VMR. Mais, ne figure-t-elle pas la raison pour laquelle les gens y emménagent?

Peut-être Ville Mont-Royal nous apprend-elle que la grandeur ne s’arrive pas sans effort. Il faut bosser pour la beauté. Et cette vieille dame à l’autre bout de la montagne continue à travailler comme un forçat condamné à la quête de la perfection urbaine. Ou, au moins, ses bonnes le font.

Pour se renseigner davantage :
Le PIIA de Mont-Royal

remerciements : Gédéon Charles et Jean-Baptiste Borvil pour les recherches

Image credits:

VILLE MONT-ROYAL – Émile Thomas et Archives de VMR

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11 comments

  1. Ville Mont-Royal est restée riche, et poursuit l’exlusion de ses voisins de Parc-Extension, mais maintenant elle devient de plus en plus cosmopolite; il y a notamment beaucoup de résidents du Moyen-Orient.

  2. Like Westmount, TMR is pretty mixed linguistically and ethnically – old stereotypes die-hard. It is a gorgeous municipality.

  3. Ville Mont-Royal est probablement la meilleure raison pour refusionner toute l’île de Montréal. On peut difficilement trouver une banlieue plus mesquine, infâme, répugnante et sordide où les valeurs les plus ignobles de l’argent dégoulinent de partout.
    La clôture avec les barrières (qui sont verrouillées lors de l’Hallow’een) le long du boulevard de l’Acadie en est une bonne illustration.
    Mais surtout, Mont-Royal n’a jamais digéré la Communauté Urbaine qui l’a dépouillée de sa police, qui expulsait immanquablement n’importe-qui avait le malheur de se présenter avec un vieux bazou (un ancien collègue, qui avait grandi à St-Laurent, se faisait immanquablement arrêter par la police à chaque fois qu’il se rendait chez ses copains, et la police leur téléphonait pour savoir si il allait réèllement là). Depuis, ils doivent se contenter de gardiens de sécurité sans aucun pouvoir.
    Il y a une semaine, je m’y promenais pour profiter de la température radieuse. Quand je me promène, j’emmene toujours mon appareil photo.
    Et bien ça n’avait pas l’heur de plaire à un gardien de la ville qui s’est mis à me demander pourquoi je prenais des photos. N’ayant pas aimé ma réponse («ça me regarde»), il a carrément appelé la police qui, après m’avoir couru après un moment, n’a finalement rien fait (vu que rien d’illégal n’a été commis).
    En comparaison, je suis allé des centaines de fois à Westmount, et je n’ai jamais eu de tel problèmes.
    (Exposé plus étoffé de cette sordide histoire ).
    Non, sérieusement, il faut rayer Mont-Royal de la carte, et refusionner tout ça. Et pas d’arrondissement spécial! Une moitié à Cote-des-Neiges, et l’autre à Villeray!
    * * *
    Oh, soit dit en passant, la photo de construction du tunnel n’est ABSOLUMENT PAS une photo de la construction du tunnel Mont-Royal. Pour en avoir des vraies, vaut mieux aller sur cette page. Et non, elle n’est pas belle, elle est très kitsch.

  4. Those unfortunate incidents aside, TMR has its own character and heritage and was developed and designed as a unique neighborhood. In other words, it is about assimilating TMR. Interesting. Guaranteed if it will cease to look the way it does today should it be swallowed up into a mega-city. What is this fixation with merging all municipalities?? Every city in N-A is composed of central cities and suburbs and central/urban municipalities. It is clear that rhetoric of mega mergers are rooted in socio-economic and politics. Nothing to do with efficiency.

  5. To Marc Dufour: Yes, because you wouldn’t call local security, if available to you, should some stranger start walking in your otherwise quiet neighborhood and begin taking closeup pictures of houses. Seems to me the individual in that message forum has had many run-ins with security and cops that maybe he should learn how to be more discrete.

  6. Why should I hide when I do the perfectly legal act of taking pictures from a public throughfare???

    The fact that the cops did not insist in asking me identification once I refused to identify myself clearly show that I was not arrested (that’s the only time they can legally demand identification), and therefore, I did not do anything illegal.

    And since rights get eroded when you don’t use them, I will be very vocal in defending the rights I already have, thank-you.

    And yes, I have the right to walk in Mont-Royal and take pictures of private property.

  7. @Edward

    «It is clear that rhetoric of mega mergers are rooted in socio-economic and politics. Nothing to do with efficiency.»

    VMR n’est pas une banlieue, c’est une enclave, tout comme Westmount (et Outremont naguère). Et si les défenseurs des fusions portent une «rhétorique» – celle d’une ville unie avec des quartiers riches, pauvres et diversifiés – les défusionistes de VMR et Westmount ont aussi la leur; celle de petites villes bien privilégiées où les taxes sont basses puisque les externalités communes aux grandes villes ne leurs sont pas factureés (pauvreté, délinquance, toxicomanie, etc.)

    Je pense qu’entre les deux rhétoriques, j’ai choisi la mienne.

  8. @marc dufour

    Salut Marc

    Tu prends tes infos dans le Journal de Montréal? J’habite à VMR, à coté de la cloture. Je peux t’assurer qu’elle est ouverte a l’Halloween. Environ 80% des kids qui sonnent che nous viennent de Park Ex. Ca me fait plaisir de leur (costume ou non) donner plus de bonbons qu’aux résidents, histoire de partager une infime partie de notre chance.

    Reste dans ton trou si t’es pas content (c’est probablement le cas de le dire).

  9. @Simon

    La Ville de Mont-Royal a déjà cadenassé les quelques portes qui permettent la circulation piétonnière entre ces deux solitudes à l’occasion de l’Halloween, la fête enfantine par excellence! Démonstration effrayante que la ville pratique un isolationnisme, voire une ségrégation sociale, pour se «protéger» des «autres». Cette pratique odieuse a cessé grâce aux nombreuses critiques, mais le mur subsiste. Cette cicatrice est toujours visible et la plaie loin d’être pansée.

    De LaPresse et non du journal de montreal

  10. @ Simon,

    de quelle chance parles-tu?
    tu m’étonnes!
    la chance d’habiter dans une maison à TMR.
    Trouve autre chose. Si tu vis seulement dans ce monde actuellement, tu n’utiliserais pas de tels propos.
    Tout peux basculer du jour au lendemain, la chance (comme tu dis) tourne aussi. Et tu peux en devenir tellement triste que habiter à TMR ou Westmount ou wherever, ne signifirait plus rien.

    Take it easy!

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