Samedi 20 août 14h39. Me voici devant l’ancien cinéma le Château situé au 6950 rue St-Denis. Cet édifice construit en 1931, à une époque où les cinémas de quartier étaient alors en abondance, est aujourd’hui utilisé en tant que lieux de culte, et ce, depuis la fin des années 1980. Étant la propriété du Centre chrétien métropolitain, visiteurs et résidents se plaisent depuis plusieurs années à lire sur la marquise de l’édifice donnant sur la rue St-Denis divers messages à saveur spirituelle. Possiblement diffusés dans l’optique de faire réfléchir, ces messages font plutôt sourire l’athée que je suis, quoique moins que le bien connu : LE SALAIRE DE TON PÊCHÉ C’EST L’ENFER, d’une certaine église de l’avenue Papineau en bordure de l’accès du pont Jacques-Cartier.
Quelle ne fut pas ma surprise de constater aujourd’hui que les paroles bibliques n’y sont plus et que pire encore, la structure de cette marquise semble actuellement être en démolition. Bien qu’elle n’était pas d’origine, celle-ci datant probablement des années 1960 ou 1970, cette marquise constitue en quelque sorte un repère visuel dans le quartier en plus d’être un élément caractéristique permettant l’identification de la vocation originelle du lieu.
La marquise le 20 août 2011
Fait à noter, l’édifice est classé monument historique en vertu de la Loi sur les biens culturels depuis 2002. Tout comme le cinéma Rialto et le théâtre Outremont, Le Château est considéré comme étant l’un des palaces de quartier les mieux préservés et les plus intéressants esthétiquement de la ville de Montréal. Tel qu’il est stipulé dans l’énoncé des valeurs patrimoniales de l’édifice diffusé sur le répertoire du patrimoine culturel du Québec, la marquise, l’élévation de quatre étages avec la cage de scène plus haute, les éléments intérieurs tels que la disposition en enfilade du hall d’entrée, du foyer, de la salle de visionnement et des balcons sont tous des éléments liés à la représentativité de l’édifice par rapport à l’histoire de l’architecture cinématographique au Québec. À cette liste s’ajoute également, divers éléments liés à la fonction de théâtre qui sont toujours présent tel que la scène, le grillage pour accrocher les décors, les loges au sous-sol ainsi que les abat-sons.
Les bureaux de l’arrondissement ainsi que ceux d’Héritage Montréal étant aujourd’hui fermés, il me fut impossible d’obtenir des informations, à savoir quelle était la nature des travaux, puisqu’aucun permis de rénovation n’est affiché sur place.
L’ancien cinéma Rialto en 2008
Certains sauront sans doute faire un parallèle entre ce cas et celui du cinéma Rialto qui fit la manchette au cours des dernières années. Cet ancien cinéma de l’avenue du Parc fut converti en discothèque en 1999, en salle de concert et de cinéma en 2002 puis en steak house en 2006. Le propriétaire étant peu soucieux de la valeur patrimoniale des lieux, ce dernier qui aura tout de même écopé de quelques contraventions pour ses travaux effectués illégalement, n’aura pas hésité à avancer la scène, à retirer les bancs, à peindre par-dessus le décor originel de l’artiste Emmanuel Briffa et à retirer l’enseigne lumineuse présente en façade. Bien que celle-ci ait été ajoutée dans les années 1940, cette enseigne, tout comme la marquise était un élément faisant partie des caractéristiques patrimoniales du cinéma.
Dans le cas du cinéma Le Château, il n’y a plus d’enseigne lumineuse en façade depuis plusieurs décennies. La marquise étant le seul élément caractéristique restant en façade, celle-ci se doit de subsister.
L’ancien cinéma Rivoli : Vers 1984-2008
Étant un simple citoyen, je n’aurai sans doute pas de retour d’appel de l’arrondissement suite à la visite d’un inspecteur en ces lieux qui ne pourra s’y déplacer que lundi. Selon une approche plus optimiste, je pourrais sans doute me dire que la nature des travaux n’est peut-être pas celle que je crois. Peut-être ne font-ils qu’une simple réfection de la structure. Mais si tel n’est pas le cas, j’espère, grâce à la publication de cet article, de mon appel à la ville ainsi qu’a celui du bureau d’Héritage Montréal, permettre l’arrêt d’une opération visant à dénaturer un édifice classé monument historique qui contrairement à son voisin, l’ancien cinéma Rivoli, à conservé (jusqu’à maintenant) sa marquise !
*** En guise de complément, voyez ICI les photographies d’un inventaire (non exhaustif) des anciens cinéma de Montréal effectué en 2008.
6 comments
Très intéressant cet article Guillaume.
J’espère qu’elle sera de retour en place, là où elle se doit d’être et non aux rebuts…!
Histoire à suivre…
On peut voir qu’en dessous, la facade semble intacte. Ca sera bien plus fidèle à l’original sans cet élément ‘moderne’ cheap des années 60.
On peut plutôt voir que la partie où se situe la marquise n’a jamais été visible et qu’elle est en brique au lieu d’être en pierre. Une fois la marquise retirée le résultat donnera l’effet d’une cicatrice.
Tel que citée précédemment, c’est l’un des éléments ”modernes” cheap des années 60 qui nous a amené aux éléments cheap des années 2000. En effet, chaque décennie a son lot de cheap et quétaineries. La seule marquise qui pourrait être acceptable est celle d’origine. Si vous faites une recherche vous trouverez une photo datant des années 30 illustrant la façade d’origine. Cette marquise serait, selon moi, trop dispendieuse à reproduire de nos jours. Pour ce qui est de la vocation première de cette institution, je crois qu’il faudrait y revenir. Y-aurait-il quelqu’un qui pourrait redonner les lettres de noblesses de ce théâtre qui jadis attirait bon nombre de cinéphiles et des spectateurs. Cette salle est magnifique à l’intérieur, ayant moi-même fréquenté l’établissement dans les années 60. Je crois qu’une salle cinéma/spectacles serait grandement bienvenue dans ce secteur nord de la ville.
Wow! That is a great building! Preserve it!!
Comment deux aussi grandes salles de cinéma pouvaient-elle subsister l’une à côté de l’autre (le Château et le Rivoli)? Si les cinémas ont été en activités en même temps, ce devait être une époque géniale….