D’abord, merci Cédric d’avoir eu le courage de photographier les restes de ces 67 pommetiers qui poussaient pendant quatre décennies au coeur de Montréal. Une des raisons pour laquelle je n’ai pas rédigé cette chronique depuis quelques semaines s’explique par le deuil que je vis par rapport à cette perte.
Perte, non seulement de ces beaux arbres, de ces belles fleurs roses au printemps, de ce parfum, de la bonté du pollen et du nectar offerts aux abeilles et bourdons, et de l’abri fourni aux oiseaux. Mais, aussi la perte de cet espace de terre vivante. C’est à dire, de la vraie terre dans laquelle ces arbres avaient le luxe de pousser. La terre qui respire. La terre non pavée.
C’est la perte aussi pour les citoyens qui se servaient de ce parc et de ceux qui le traversaient. Bien d’entre nous attendaient avec impatience le printemps rose de ce petit square du centre-ville.
C’est également la perte d’une possibilité qu’avait notre gouvernement municipal de dire: Nous aimons nos arbres, nous encourageons la biodiversité, et nous respectons notre propre Politique de l’arbre de Montréal et notre engagement envers la protection de la biodiversité.
“L’arbre montréalais n’est pas une simple pièce de mobilier urbain. Il est un être vivant à respecter et dont il faut prendre soin,” s’écrit sur le site web de la Ville.”Quand ça nous convient,” auraient peut-être dû rajouter les auteurs.
Pourquoi pas intégrer l’infrastructure botanique dans la planification urbaine? Soixante-sept pommetiers en fleurs, ne sont-ils assez spectaculaires pour le Quartier des spectacles? Pourquoi pas n’ont-ils pas pensé exploiter la beauté et l’architecture de ces arbres pour créer la Scène des pommetiers pour les concerts strictement en plein air — à tous les dimanches. Pensez à la petite scène chaleureuse et acceuillante à côté du moulin à l’Ile de la Visitation où pendant tout l’été se tiennent des concerts.
Mais, cette occasion manquée de montrer de l’imagination pour la planification urbaine à l’ère de post-consommation-à-tout-prix est maintenant du passé et la saison est trop belle pour se laisser abattre par les cicatrices de la vieille pensée. On vit une période de transition et on est peut-être encore au stade de deux pas vers l’avant, un vers l’arrière. Faut respirer par le nez (sentir des parfums de printemps) — et éviter de passer par le coin St-Urbain et de Maisonneuve.
Alors, pourquoi la photo de cette fleur, l’erythrone (Erythronium americanum, trout lily), prise hier sur le piedmont est de Mont Royal? Non, cette chronique ne devient pas Le mardi des fleurs. Cette fleur nous rappel de l’immense biodiversité de notre forêt urbaine. C’est à dire l’érablière à sucre. L’érable à sucre lui-même n’est pas là mais la forêt dans laquelle il constitue, en nombre, le plus important espèce, est en pleine effervescence. C’est le moment où les fleurs printanières profitent de quelques mois de luminosité pour pousser et fleurir avant que la canopé au dessus se ferme.
Allez, profitez de ce moment tendre. Un endroit que je recommende pour voir plusieurs espèces de fleurs éphémères (i.e. qui disparaissant une fois les feuillus sont en feuilles), c’est le piedmont du mont Royal, autour des sentiers qui sont à l’intérieur de la grande courbe du chemin Camillien-Houde. Prenez soins de marcher seulement dans les sentiers et de ne rien ceuillir. Les trilles (Trillium grandiflorum, trilliums), par exemple, vont regresser de sept ans si on prend sa fleur (qui flâne tout de suite de tout façon)!
Un dernier mot, par rapport aux pommetiers disparus, ce n’est pas vrai qu’ils ne vivent pas lontemps — comme si ça pouvait justifier des les abattres. En voici un qui a à peu près 100 ans:
Il pousse dans la ruelle entre l’av. Landsdowne et le parc Westmount, côté ouest, un ancien sentier amerindien qui suivait un ruisseau, maintenant souterrrain. La vie moyenne d’un arbre planté dans un cube de terre dans le trottoir, par contre, n’est que 15 ans, en moyen. Et, ça serra la situation pour les 87 nouveaux arbres que Clément Demers, de la Société quartier international, se vante de planter à l’été 2010 pour remplacer les pommetiers disparus. Vive la biodiversité — la vraie!
4 comments
Merci de remettre les pendules à l’heure concernant l’espérance de vie des pommetiers.
Cette histoire m’a fendu le coeur. Plus près de chez moi, je vois un tout petit parc pour petits-enfants au coin sud-est de Drolet et Bélanger/Mozart (c’est l’endroit où cette rue change de nom). Il y a plusieurs pommetiers qui nous offrent leurs fleurs roses au printemps et leurs feuilles rouge-vif à l’automne.
Avant, cet endroit n’était qu’un élargissement de la chaussée, fort dangereux par ailleurs pour les piétons et les enfants qui y jouaient.
Je m’attendais à avoir le plaisir e retrouver le petit parc au centre-ville en pédalant le long de la nouvelle piste Claire-Morrissette (là où il n’y a pas de détours!)
De tels choix m’inspirent des craintes: un quartier de spectacles présentés comme marchandises, aux antipodes d’un lieu de création culturelle.
Le béton et la rationalisation !!! Tout cela passera. des relents archaïques du progrès à tout prix! Ainsi va le monde … Je vois revivre la terre montréalaise avec ses ruisseaux , je rêve d’un peu plus de tendresse . J’entends l’orgueil éphémère des centre-ville du monde craquer de son propre enfermement . Je sais comme l’érable argilière voir les possibilités de la vraie Vie. L’humain vie d’une vie d’exil et il l’a oublié . Des pommiers en fleurs du centre-ville prophétisaient la Beauté et la Fragilité . De cette blessure de terre jaillira un autre insoupçonné . La Vie a des surprises à nous offrir , nous les pillards aux regards qui ne voient plus les étoiles. Amicalement. Charles.
Roger – The Botanical Garden has a Japanese-style picnic under the crabapples in the Japanese garden. It’ll be this weekend, on the 17th. If you prefer to do your own, there are some 20+ crabapple trees between Verdun metro station and Verdun Borough Hall. There’s even a nice bakery/cafe on the corner, if you don’t want to bring your own food.