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Canadian Urbanism Uncovered

Qualité de vie – Comment calculer l’incalculable?

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Le magazine Monocle sortait ce mois-ci son toujours très attendu palmarès des villes où il fait très, très bon vivre. Cette année, Montréal dégringole en 24e position (en raison, entre autres, de son « bloated municipal government »). Des classements du genre, il y en a tout plein: Mercer, où Montréal se classe au 21e rang mondial; ECA International, où elle arrive ex aequo avec Ottawa (!) au 27e rang; Economist Intelligence Unit (EIU), où il faut vendre son rein droit pour se payer l’accès aux bases de données complètes; et plusieurs autres. Dans la grande majorité de ces classements dits objectifs, Toronto arrive avant Montréal. Pourtant, un récent sondage réalisé par Léger Marketing démontre à quel point les Montréalais sont heureux de ce qu’offre leur ville comme qualité de vie. Loin devant les Torontois. Clairement, on ne regrettera pas l’époque où le PIB était le seul critère sur lequel les villes se faisaient la lutte, peu importe si les dépenses avaient un impact positif ou négatif sur la population. Mais, est-ce que ces nouvelles méthodologies passent elles aussi à côté de facteurs intangibles trop complexes à évaluer?

Rappelons que les compagnies spécialisées en la matière (Monocle exclu) réalisent ces études pour aider les gouvernements et les multinationales à évaluer la compensation financière à accorder à leurs employés lorsque ceux-ci sont transférés dans une autre ville. Une simple question de gestion de l’expatriation. Pour caricaturer, si une compagnie transfère un employé et sa famille d’Outremont à Bagdad, la compensation en argent devra être fort importante pour les convaincre, alors que l’inverse n’est pas le cas. Ces classements sont donc conçus principalement pour une minorité d’individus, généralement nantis, éduqués et très spécialisés. Des candidats que les grandes villes s’arrachent. Les répercussions sont en revanche beaucoup plus grandes que pour ces « happy few ». Les listes de lauréats qui découlent de cet exercice sont devenues des incontournables dans le marketing des villes à l’échelle internationale. Autant pour l’administration des métropoles que pour ses habitants. Aussitôt publiques, ces données sont reprises dans les médias locaux et échangées massivement sur les médias sociaux. Chacun y va de sa fierté ou de sa déception de voir SA ville se classer à tel ou tel rang. Les réactions sur Twitter au sujet de la médaille de bronze gagnée par Montréal dans la discipline « meilleure ville estivale » du Lonely Planet en disaient long.

J’ai passé deux semaines à Berlin cet été. Coup de coeur total. J’ai ressenti dans cette ville une liberté d’être et une énergie créative comme nulle part ailleurs. Le contraste avec Paris, par exemple, était notoire. Dans la capitale de l’Hexagone, tout me semblait plutôt rigide. J’avais l’impression que je devais me conformer à un certain modèle en respectant de nombreux codes. Évidemment, en raison de l’impressionnant taux de chômage de Berlin, Paris gagne toujours ce genre de courses à la meilleure qualité de vie (à part dans Monocle, le seul à se risquer à une certaine subjectivité éditoriale où la « coolitude» peut l’emporter). Mais bref, tu mesures ça comment, la « liberté d’être »? Ruraigh Purcell de ECA International l’exprime autrement: « I consider London for example also as a great city, because it has an edge and a sort of gritiness to it. But things don’t work there all the time. In cities such as Vienna or Vancouver things seem to work much better, but that makes them also quite boring. But how do you mesure this fun-or boredom factor? ». J’ai l’impression que c’est peut-être ce facteur que Lonely Planet voulait mesurer en faisant passer au vote ses « followers » sur les médias sociaux. Malheureusement, la solidité de leur méthogologie est comparable à l’architecture d’un viaduc de Laval. Ou, plus sérieusement, à celle du concours Monopoly Monde où Montréal a obtenu la plus prestigieuse case en raison de l’hyperactivité de ses habitants sur les médias sociaux (ou devrait-on plutôt invoquer son complexe d’infériorité?).

Alors, comment calculer l’incalculable?

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2 comments

  1. Dans les approches qualitatives, on évalue des perspectives à l’aide de valeurs temporelles construites socialement. On a beau utiliser toute la philosophie ou toute la psychologie du monde pour comprendre cette phénoménologie qui vient alors nous bercer, n’en reste que les biens urbains désirables relève de mouvance mondiale, d’un mouvement de pendule entre ce qui est qualifié de luxe et ce qui est qualifié de normal.

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