Contribution spéciale de Christophe-Hubert Joncas.
Bien que les Canadiens s’adonnent aux courses de chevaux, dites traditionnelles, dès le début du 18e siècle, ce n’est seulement lorsque les Britanniques s’installent au Canada, à la suite de la conquête de 1760, que sont introduites les courses de chevaux sportives instituées et codifiées par Henri VIII (1491-1547).
Les premières courses sportives sont organisées à Montréal vers 1828 dans un secteur situé sur le territoire de l’ancienne ville Saint-Pierre plus tard connu sous le nom de Blue Bonnets.
Plusieurs thèses sont avancées pour expliquer l’origine de ce nom. La plus souvent avancée associe l’origine du nom à Alexander McRae, un sergent attaché au régiment écossais basé à Montréal, qui aurait ouvert en 1842 une taverne sous le nom de Blue Bonnets. En raison de la popularité de la taverne – qui devient rapidement un arrêt incontournable pour assouvir tant la soif des cavaliers que de leur monture sur le chemin fréquenté entre Lachine et Montréal – le village de même que le lieu où se pratiquent les courses auraient fini par être reconnus sous la dénomination Blue Bonnets.
La construction du chemin de fer entre Lachine et Montréal en 1847 entraîne toutefois la destruction de la piste et du village de Blue Bonnets. Malgré cette démolition forcée, en 1872, une nouvelle piste de course est aménagée dans le secteur actuel de Montréal Ouest, à proximité du lieu originel, au grand plaisir des amateurs de chevaux.
Puisque le nom de Blue Bonnets est déjà à l’époque fortement ancré dans la mémoire collective du milieu équestre montréalais, la nouvelle piste conserve le nom de la première.
La piste de Blue Bonnets est alors un témoin parmi d’autres de l’importance accordée au cheval à cette époque. En effet, les chevaux sont fortement mis à profit à Montréal pratiquement jusqu’au début milieu du 20e siècle notamment pour assurer le bon fonctionnement des activités de débardage au port et de la distribution du lait et de la bière.
Le cheval est à cette époque aussi estimé pour ses qualités physiques et esthétiques et constitue une source de fierté pour son propriétaire. L’abondance d’archives photographiques mettant en scène des chevaux dans la collection Notman du Musée McCord en témoigne.
Peu de temps après sa fondation en 1905, le Montreal Jockey Club se met à la recherche d’un grand terrain plat et nivelé pour une nouvelle piste. Après plusieurs démarches, le club achète plusieurs lots dans le village de Notre-Dame-des-Neiges Ouest et entreprend les travaux de construction de l’hippodrome selon un plan d’ensemble s’inspirant de celui de Saratoga situé dans l’État de New York.
La popularité des courses de chevaux est telle dans les années 1930 et 1940 qu’on note la présence de nombreux hippodromes en plus de Blue Bonnets dans la région de Montréal, dont ceux de Dorval, de Richelieu, de Mount Royal, de King’s Park et du Parc De Lorimier, tous démolis depuis (Image située au début de l’article: la partie ouest de Ville Mont-Royal montrant les hippodromes Blue Bonnets, Mount Royal et King’s Park. Source: Archives Ville Mont-Royal, 1945.)
Réaménagé dans les années 1950 et 1960, Blue Bonnets est le seul a avoir été en opération au-delà des années 1980. Vestige d’une autre époque, il témoigne toujours de l’importance historique des chevaux à Montréal.
Christophe-Hubert Joncas a une formation multidisciplinaire en biologie, en anthropologie et en urbanisme. Il s’intéresse à l’histoire et à l’architecture de Montréal ainsi qu’aux types d’occupation du territoire. Il a été chargé de projet d’une étude patrimoniale sur l’hippodrome de Montréal, fait par L’Enclume – Atelier de développement territorial.