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Canadian Urbanism Uncovered

De l’intervention divine dans les structures

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(Photo: Alexandre CV)

En juillet 2007, soit environ un an après l’effondrement du viaduc de la Concorde,  la firme de sondage Léger marketing présentait les résultats d’un sondage traitant du sentiment de sécurité des Québécois à l’égard des ponts et viaducs. Évidemment, nul besoin de s’étendre sur l’unanimité du sentiment d’insécurité des automobilistes lors d’un passage sous viaduc. Depuis environ cinq ans, les structures de béton et d’acier font beaucoup parler d’elles, avec l’apogée médiatique que connaissent Turcot, le pont Champlain et le tunnel Ville-Marie, notamment. L’effondrement sur l’autoroute 720 d’un paralume (ironiquement, c’est une structure destinée à limiter l’aveuglement des automobilistes…), a conduit à la désormais célèbre phrase du ministre des Transports Sam Hamad « toutes les routes qui sont ouvertes sont sécuritaires ». Ceci a ouvert un axe de réflexion intéressant. Celui du sentiment collectif de sécurité et de la divinisation des structures.

L’automobiliste connaissait auparavant la majorité des risques potentiels d’accidents (alcool au volant, vitesse, états de la route, distraction, etc.) et il pouvait potentiellement les prévoir ou du moins en amoindrir les impacts. Avec l’effondrement des structures, l’on est désormais laissé dans l’incertitude totale. Même l’instance suprême chargée de sécuriser ces structures est aussi dans une forme de néant. En brisant le lien-clé entre son travail du paysage et les causes exactes de sa destruction, l’homme a réussi à créer des petites catastrophes naturelles.

Alors que la majorité de nos structures atteignent leur fin de vie utile (environ 40 ans), le concept général de la sécurité routière s’élargit à la menace externe, bien réelle, d’être écrasé, enseveli ou bloqué par un pont, un parapet, un affaissement ou autre acte dont la nature et la cause sont souvent complexes. À cet effet, le sfumato qui entoure la détermination des causes ou responsables de dégradations suite à des accidents est fameux. Même les enquêtes se bornent, dans la plupart des cas, à déterminer plusieurs facteurs, processus ou interventions diverses plus ou moins connues ou identifiables. Ces accidents évoquent l’acte de Dieu.

La béatitude qui régnait par rapport à nos structures, par rapport à notre paysage de la mobilité urbaine, change. La sidérante beauté de l’utopie des structures modernes devient pittoresque, inquiétante puis enfin terrifiante.

Quel peut-être l’impact d’une réquisition par une force indéfinie de notre construction sociale du sentiment de sécurité dans les transports? Cette force, cette accumulation d’anticipations, d’évitements, de non-lieux et d’indéfinissables va changer la perception paysagère que les gens ont des infrastructures routières. Le fait de ne plus se sentir en sécurité dans un paysage que l’on traverse, que l’on vit, rend le quotidien empreint d’angoisse et de fébrilité.

Le déclin des années cinquante se matérialiste ou plutôt se dématérialise, c’est selon.

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